POUVOIR ET INTERNET
D’après ce spécialiste de la sécurité, la technologie amplifie la puissance non seulement des internautes, mais aussi – et de plus en plus – des pouvoirs en place. Les institutions puissantes (gouvernements et entreprises) peuvent être lentes à faire usage de ce nouveau pouvoir, mais, comme elles sont puissantes, elles peuvent l’utiliser plus efficacement, et y contrôler leurs intérêts. Dans ce contexte, les débats sur l’avenir de l’internet sont moralement et politiquement complexes. Comment concilier respect de la vie privée et renforcement de la loi pour prévenir les violations au droit d’auteur ou la pornographie infantile ? Avons-nous le droit de corriger les données nous concernant ? De les effacer ? Voulons-nous de systèmes informatiques qui oublient des informations après quelques années ? Ces enjeux nécessitent un débat constructif, une coopération internationale et des solutions itératives : si nous n’essayons pas de comprendre comment façonner l’internet de sorte que ses effets positifs l’emportent sur les effets négatifs, de puissants intérêts le façonneront. Il va falloir se battre pour que l’avenir d’Internet appartienne aussi à la population, alors même que les batailles pour l’internet de demain ont lieu maintenant : dans les parlements à travers le monde, au sein d’organisations internationales comme l’Union internationale des télécommunications ou l’Organisation mondiale du commerce et dans les organismes de normalisation. Et aujourd’hui ceux qui battent les tambours de la cyberguerre ne proposent pas de défendre les meilleurs intérêts de l’internet ou de la société, la course aux armements est alimentée par l’ignorance et la peur et se traduit par l’escalade du développement de cyberarmes pour l’attaque et plus de cybersurveillance pour la défense : cela risque d’avoir pour conséquence de déplacer le contrôle gouvernemental jusqu’aux protocoles de l’internet, quand bien même cela réduirait l’innovation née de la libre concurrence sur le réseau. Trois affaires récentes d’arrestation et d’identification via l’internet sont alors prises en exemple pour démontrer qu’internet est désormais un état policier. Tout est enregistré et croisé, et de nombreuses entreprises de big data font des affaires en reconstituant les profils de notre vie privée à partir de sources variées, quelque soit la volonté de s’en prémunir. Il resterait donc à établir un plan de bataille, pour que la technologie la plus stimulante du XXIe siècle ne se résume pas à la mise en place du pire Etat policier que nous n’ayons jamais imaginé.
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