Brèves prospectives

LE COMBAT DE L’ISLANDE CONTRE LES RESPONSABLES DE LA CRISE

Quand l’Espagne, la Grèce et le Portugal s’enfoncent dans l’austérité, l’Islande a choisi de faire condamner les responsables de la crise financière, et prouve qu’un pays peut survivre à un crash mondial, sans endetter ses citoyens sur plusieurs générations ni transformer des dettes privées en dette publique : le taux de chômage, qui dépassait les 8 % en 2009 et 2010 après le tsunami financier de fin 2008, est redescendu à 4,4 %, les hausses d’impôts ont visé principalement les plus hauts revenus, et la dévaluation de la couronne a dopé l’économie (les banques islandaises ont allégé la dette de plus d’un quart de la population et sont obligées d’effacer une partie des dettes immobilières des particuliers lorsque celles-ci sont supérieures à 110% de la valeur du bien).

Sous la pression populaire, le pays a donc mobilisé ses faibles moyens pour enquêter sur les crimes financiers et établir les responsabilités, donner à la justice des moyens conséquents (pour assurer une très bonne connaissance des dossiers face à l’armée d’avocats engagés par les banquiers), lever le secret bancaire, et faire aboutir les procédures judiciaires. Aujourd’hui des anciens PDG et ex-dirigeants écopent de peines de prison allant de plusieurs mois à plusieurs années de prison ferme pour la plupart, et d’autres dirigeants sont inculpés pour manipulation du cours des actions, fraude, évasion fiscale ou délit d’initié (notamment dans l’administration). Au total, une centaine de personnes devraient être inculpées d’ici fin 2014, permettant de dire que, si le système n’a pas changé, certains en sont néanmoins exclus, et l’Islande n’est pas autant ouverte qu’avant au système financier international.

Ce processus se fait dans une transparence totale : une Commission spéciale d’enquête a ainsi été chargée d’établir une chronologie de la crise, d’analyser avec minutie le processus d’effondrement bancaire (comment la taille des trois principales banques a été multipliée par 20 en sept ans par exemple, ou pourquoi les propriétaires de ces banques en étaient également les principaux emprunteurs…) et d’examiner les responsabilités de chacun des acteurs économiques. Les huit livres résultants de ce travail sont disponibles dans les librairies, et ne taisent aucun nom.

Un autre résultat est la décision de la justice européenne de donner raison à l’Islande qui a refusé de rembourser les dettes des actifs pourris (la liquidation de la banque les remboursant finalement). Une décision de justice qui pourrait ouvrir la voie pour d’autres pratiques…

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