Brèves prospectives

DÉTROIT, LABORATOIRE DU MONDE D’APRÈS

La ville de Détroit, symbole du capitalisme et de l’industrie automobile, n’est plus que l’ombre d’elle-même. En cinq ans, ses habitants ont subi une brutale décroissance forcée : un taux de chômage exorbitant, un exode urbain sans précédent, des services publics délabrés (fermeture massive d’écoles (50 % dans le centre ville, fui par les Blancs et aisés), coupures d’électricité et d’eau, services de santé inaccessibles pour les plus démunis). Pourtant, derrière les scènes de désolation, une société post-industrielle est en train de naître, grâce à l’expansion d’une agriculture urbaine et à l’émergence de solidarités de quartier. En effet, de plus en plus de jeunes gens quittent les banlieues et regagnent le centre-ville pour s’y installer. Ils y achètent une maison à bas prix, s’équipent d’un vélo et réinvestissent progressivement Détroit. Et alors que la portion de la ville inoccupée est évaluée à 233 km² (sur une surface totale de 350 km²), la « Rust Belt » pourrait se transformer en « Green Belt » : aujourd’hui, plus de 1 300 jardins sont gérés par un programme, qui, contre 10 $ par an (7 euros) pour les jardins communautaires et 20 $ (15 euros) pour les jardins familiaux, assure distribution de graines, plants et formations. Développer un jardin est aussi vu comme un moyen de construire une solidarité de quartier, une communauté, et de la rendre résiliente aux événements extérieurs. Cette transformation du rapport à la nourriture générerait donc une véritable révolution culturelle au pays des Fast-Food, l’agriculture étant perçue comme un moyen de se nourrir, de créer des emplois plus sains pour tous et de redonner du sens à la vie collective. Un combat qui va de pair avec celui de la préservation de la pression urbaine des fermes alentours, seules à même de produire des cultures à faible valeur ajoutée, comme le blé ou le haricot noir. Les moteurs du mouvement pour la relocalisation de l’alimentation espèrent que ce dernier saura s’inspirer du modèle économique de l’industrie de la bière aux Etats-Unis, qui montrent des coopératives de bières artisanales locales gagnant des marchés de grandes firmes.

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