QUAND UN ATELIER HAUTE-COUTURE 100 % COOPÉRATIF RÉSISTE AUX DÉLOCALISATIONS
Ici, pas de travailleuses uniformément courbées sur leurs machines, les dents serrées pour respecter la cadence, ni de monceaux de marchandises fabriquées en série. Aux Atelières, on produit en petites quantités des pièces « parfaites », et on prend le temps qu’il faut pour ça. C’est quand quatre des cinq usines françaises de Lejaby ont fermé, que Nicole, ouvrière cofondatrice, a rencontré une autre forte femme. A la tête d’une agence de communication, Muriel Pernin a découvert à la télévision le désarroi des ouvrières, et avait lu que les grandes maisons de couture, quand elles se positionnent à l’international, ont besoin de fabriquer en France. »Huit personnes, dont six salariés et anciens salariés de Lejaby, se sont risquées dans cette aventure à contre-courant et se sont associées à Muriel Pernin au sein d’une Société coopérative d’intérêt collectif (Scic), ce qui a changé l’ambiance de travail, puisque contrairement aux autres ateliers là, tout le monde participe et pose des questions. Les associés se sont appuyés sur un noyau de couturières expérimentées, et désormais Muriel Pernin assure bénévolement le poste de PDG. Les ouvrières ont suivi une formation très spécifique, conçue sur mesure. Le savoir-faire de la coopérative et la possibilité d’afficher du Made in France ont alors convaincu une poignée de grandes marques (Lejaby, Agnès B, Zahia…) et quelques jeunes créateurs de lui confier des collections. Un des défis majeurs aujourd’hui pour la coopérative, c’est de trouver un mode de production adapté aux petites quantités, les seules à échapper aujourd’hui à la délocalisation, alors que l’appareil industriel est fait pour gérer de grandes quantités. Un partenariat avec l’Insa a donc été mis en place, qui doit aider à trouver le meilleur fonctionnement, et qui pourrait servir aussi à la maroquinerie, la ganterie, la bijouterie… La confection locale sera-t-elle désormais réservée aux riches ? Cet exemple veut prouver que non, que le luxe sera un tremplin pour faire revenir la production sur le moyen et haut de gamme , et qu’à partir du moment où on réinstalle des savoir-faire, c’est possible produire pour la population française. Mais il faudra faire des choix : avons-nous vraiment besoin de 15 culottes dans notre armoire ?
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